« Tu m’aimes donc, Sonyong » est un roman écrit par Kim Yeonsu. Il est paru en 2003 en Corée du Sud sous le titre de « Sarangirani, Sonyonga » (사랑이라니, 선영아) puis traduit en français en 2017. Dans son roman, l’auteur expose à travers ses personnages une véritable réflexion sur l’amour et les sentiments.
KIM Yeonsu :
Née en 1970 à Gimcheon, Kim Yeonsu est diplômé en langue anglaise. Après avoir partagé sa vie professionnelle entre les bureaux le jour et la traduction la nuit, il devient reporter en 1997 pour divers magazines. Deux romans ont déjà été publiés en France :
- « Je suis un écrivain fantôme » – Imago, 2013.
- « Si le rôle de la mer est de faire des vagues… » – Picquier, 2015.
La simplicité des personnages
Kim Yeonsu exprime sa pensée de l’amour à travers des personnages très simples et accessibles. Habitants de Séoul, plutôt de classe moyenne, les protagonistes de l’histoire son une bande d’amis diplômés dans les années 80.
Le roman est introduit par la cérémonie de mariage de Gwangsu et Sonyong, autrefois camarade de classe. On alterne alors successivement les différents récits des personnages par un point de vue omniscient, passant des souvenirs au présent.
Parmi les différents personnages présents dans le récit, Kim Yeonsu se concentre sur trois d’entre eux : Gwangsu, Sonyong et Jinu.
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Gwangsu :
Gwangsu est amoureux de Sonyong depuis 13 ans. C’est aussi l’un des meilleurs amis de Jinu, bien qu’ils aient des façons de pensées diamétralement opposées.
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Sonyong :
Amoureuse de Jinu dans le passé, leur relation a été assez chaotique. Jinu n’avait pas de réel sentiment pour elle. Aujourd’hui, elle aime Gwangsu qu’elle s’apprête à épouser.
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Jinu :
Jinu est un écrivain qui se donne des airs de philosophe. Grand séducteur, il est sorti rapidement avec Sonyong dans le passé, mais durant leur relation il avait des sentiments pour une autre femme. Après avoir revu Sonyong lorsque son ami Gwangsu lui annonce son mariage prochain, Jinu essaye de reconquérir le cœur de Sonyong. On se demande alors s’il est réellement amoureux de la jeune femme.
Réflexion sur les sentiments
De nombreux sentiments sont abordés dans le récit de Kim Yeonsu, tous liés à la notion complexe de l’amour. À travers les relations entre Gwangsu, Sonyong et Jinu, l’auteur réalise un véritable exposé sur l’amour et ce qui en fait sa complexité.
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Ah, l’amour !
L’amour c’est difficile, il faut avant tout se connaître soi-même pour pouvoir aimer l’autre. Ensuite, il faut accepter de dévoiler à quelqu’un ce que l’on ait, de prendre le risque de s’exposer. On parvient alors à la conclusion que connaître l’autre c’est « aimer ».
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Du doute à la jalousie
Seulement, nous sommes inévitablement heurtés par l’impossibilité de connaître l’être aimé totalement. Le doute vient alors noircir le tableau. Gwangsu finit par douter de la sincérité des sentiments de Sonyong à son égard.
« Même si on aime l’autre de toutes ses forces, il reste toujours en elle, en lui, des zones d’ombre. »
Puis, lorsque le doute prend plus de place que la confiance que l’on accorde à l’autre, la jalousie fait progressivement son nid. Gwangsu doute, alors il devient jaloux de Jinu. Son imagination prend le dessus et il pense inévitablement au pire entre Sonyong et Jinu. Cependant, l’auteur semble penser que sans jalousie il ne peut pas vraiment y avoir d’amour.
« La jalousie, c’est comme un virus, elle a besoin d’un hôte pour survivre. Ce n’est pas un sentiment autonome, mais un corollaire de l’amour. »
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Une réalité déformée par nos souvenirs
Les souvenirs que nous avons de notre passé peuvent se ternir ou être déformé par le temps. Un événement qui nous a marqués, dont on se souvient comme si c’était hier, ne peut tout simplement pas exister dans la mémoire de notre voisin, car il l’a déjà oublié. C’est simplement parce qu’il n’y accordait pas la même importance. Notre perception est simplement différente.
Ainsi, Sonyong a été particulièrement sensible à sa relation passée avec Jinu. Ayant été éperdument amoureuse de lui, ses souvenirs avec Jinu restent très présents. Elle a souffert de son comportement, de son amour à sens unique et des sentiments de Jinu pour une autre femme. De son côté, Jinu ne se souvient pas du tout des événements cités par Sonyong. Il ne peut donc pas comprendre les réactions excessives et les reproches de Sonyong à son encontre.
Nos souvenirs influencent aussi notre vie présente ainsi que nos comportements face à tel ou tel situations. À travers le souvenir de son histoire avec Jinu, Sonyong ne peut que poser la question « Est-ce que tu m’aimes vraiment ? » tantôt à Jinu, tantôt à Sonyong. Elle a peur d’être blessée à nouveau. Ses souvenirs déforment aussi sa perception de la réalité, affirmant à Gwangsu que Jinu a chanter la chanson « Toi la cruelle » lors de leur célébration de mariage. En réalité, il n’avait pas chanté cette chanson. Sonyong a simplement été marqué par cette chanson entonnée par Jinu dans le passé.
Une narration poétique
L’écriture de Kim Yeonsu est véritablement plaisante à lire. Il expose sa réflexion sur les sentiments avec beaucoup de références et d’illustrations poétiques.
Ainsi, le doute s’éveille chez Gwangsu le jour de leur mariage. Il s’aperçoit que l’une des branches d’une orchidée phalaenopsis du bouquet de la mariée est cassée. Gwangsu pense alors que quelque chose ne va pas dans son mariage. Par la suite, nous allons retrouver cette orchidée durant toute la narration de l’histoire. La cassure de sa tige, pourtant fragile, va poursuivre Gwangsu et le maintenir dans ses doutes.
Gwangsu remet alors toute son histoire en question après la vue de cette orchidée phalaenopsis brisée. Il se souvient alors que le jour de son mariage c’était un jour de pluie et de neige mêlé, ce qui provoque en lui une grande confusion. En effet, dans la culture coréenne, se marier un jour de pluie et plutôt un mauvais présage alors qu’un jour de neige est un jour heureux. Gwangsu pense que le ratio est alors de « moitié/moitié ».
Le doute grandissant, il pense au passif de son ami avec sa femme. Il a peur que Sonyong et Jinu aient toujours des sentiments l’un envers l’autre. Sa jalousie ne cesse de s’accroitre avec la déformation des souvenirs de Sonyong et le jeu de séduction de Jinu avec celle qui va devenir sa femme. Devant les photos de son mariage, Gwangsu vient même à penser que Jinu et Sonyong ressemblent davantage au couple de jeunes mariés.
Un rapide passage dans la société coréenne
Au cours du roman, nous pouvons aussi en apprendre davantage sur la société coréenne. L’auteur aborde brièvement, dans les dialogues de ces personnages, les années 80 en Corée du Sud et ces mouvements étudiants. Le monde du travail est ensuite abordé : dîners d’entreprise, poids de la hiérarchie, importance de l’entreprise dans laquelle on travaille ainsi que le poste que l’on occupe. Les élections et le passage de la dictature à la démocratie sont également l’un des sujets de la conversation des personnages. La place de la femme dans la société coréenne est aussi abordée.
Jinu expose également son image de l’amour. Pour lui, « l’amour romantique » est une invention du capitalisme. Il est aussi contre le mariage. Jinu compare l’amour à un produit industriel soumis à des normes et ayant le même cycle de vie : début, essor, paroxysme et fin. L’amour inventé par les capitalistes serait simplement un moyen de forcer les personnes à travailler et ainsi les priver de la liberté.
En bref :
« Tu m’aimes donc, Sonyong ? » est un roman agréable à lire. Il nous invite à la réflexion sur l’amour et tente de nous faire saisir sa complexité. La narration et le point de vue adopté sont parfaits pour nous imprégner de l’univers et de la vie des personnages.
La chronologie des événements tels que relatés dans le roman peut parfois poser quelques soucis de compréhension. On ne parvient pas immédiatement à comprendre les pensées et les réactions des personnages, ce qui soulève en nous beaucoup d’interrogation. Cependant, ce choix nous maintient en haleine et on éprouve le besoin de poursuivre sa lecture afin de comprendre réellement l’histoire des personnages.
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